La Chute de Lapinville, notre nouvelle fiction épique et drôle. Un épisode du lundi au vendredi.

 

 

 

    Loading...
    Loading...

    Actualités

    La Chute de Lapinville

    De l’humour et des rebondissements, livrés chaque matin de la semaine : avec La chute de Lapinville, son ambitieuse série de fiction quotidienne, ARTE Radio innove, fidèle à sa trajectoire d'aventurière de l’audio. Dans cette saga sonore, récits, narrateurs et temporalités s’enchâssent en une jubilatoire fuite en avant, dopée par l’humour ravageur de Benjamin Abitan (La dernière séance, La préhistoire du futur), Wladimir Anselme (OUI, Le catch, Hommes vus), et Laura Fredducci, autrice pour la télévision. Entre esprit railleur des Simpson et parodie de Plus belle la vie, un feuilleton sonore qui promet chaque jour une dose de provocation, d'ironie et de répliques culte.

    Lapin, pervers narcissique en fin de droits, raconte son retour à Lapinville et sa décision de faire un podcast pour se venger de ses anciens camarades d’école. Il est bientôt rejoint par Chloé Bloomington, star de cinéma qu’une énorme shitstorm oblige à revenir dans sa ville natale pour jouer dans une fiction quotidienne à la con. Puis, on suit l’enquête de Spiruline, astucieuse stagiaire à la mairie, qui dévoilera des scandales insoupçonnés dans les plus hautes sphères de Lapinville… Tour à tour, les Lapinvillois témoignent pour essayer de comprendre comment, une chose en entraînant une autre, ils ont fini par provoquer la destruction de la Terre. Leurs destins entremêlés forment une pelote visible de l’espace dont cette série, cinq minutes par jour, va dérouler le fil. Fresque épique et palpitante, chronique de la catastrophe en cours et de ses ramifications les plus inattendues, La Chute de Lapinville a pu être décrite comme une variante des Simpson à la sauce rond-point ou un jumeau maléfique de Plus belle la vie.

    Découvrir le podcast.

    Le Radio show, en léger direct de 2023

    Après Dépêche, revue de presse sonore mordante (150 numéros, 2018-2022), Olivier Minot, alias Livo, fait son grand retour sur ARTE Radio avec un spectacle collectif et interactif de radio en live, à retrouver en podcast.

     

    Nous assistons à la fabrication d’une émission qui raconte la vie, à travers des échos subjectifs de l’état du monde, dans une mauvaise foi assumée. Olivier Minot (Livo) et Annabelle Brouard (Abad), sa coréalisatrice, jouent sur scène avec la radio et les auditeurices/spectateurices. Entre interventions sur un sujet d’actualité, montages élaborés, quiz et archives, ils fabriquent sur scène une heure de convivialité et de fragilité pour donner naissance à un podcast en ligne pour toujours.

     

    Pour ce 2ᵉ Radio show, l'équipe est en léger direct de 2023. À travers la vie mouvementée d'un personnage qui a traversé 2023 à 100 à l'heure, on achève cette année à coup de haches, de montages improbables, de micro trottoirs, de fausses pubs et d'histoires vraies.
    Du mouvement contre la réforme des retraites à la mort de Matthew Perry en passant par les violences policières, le Schiappa Gate, la tempête Ciarán, Sainte-Soline, la guerre en Palestine, les plus grosses conneries de Pascal Praud, l'inflation, le petit Emile, la littérature dilatée comme jamais, le ministre de la Justice jugé, la menace du point médian, etc. 

     

    Notre personnage fonce dans tous ces grands évènements qui ont fait 2023. En racontant son année, il incarne ces 12 derniers mois avec passion.

     

    Donc, où se tourne ce super Radio show, en léger direct ? à la Gaîté Lyrique, au 3bis Rue Papin, 75003 Paris. À quelle heure ? 16h. Il faut prendre sa place ? Oui, juste ici : gaite-lyrique.net/evenement/le-radio-show-en-leger-direct

     

    Découvre Radio Timing, 1ᵉʳ numéro du Radio show, en léger direct : https://www.arteradio.com/son/61680531/radio_timing

    L'exercice d'écriture d'Alice Zeniter

    Après Nicolas Mathieu, c'est au tour d'Alice Zeniter de proposer un exercice d'écriture sur l'Instagram d'ARTE Radio. La consigne était : "Écrivez la vie entière d’un personnage ou d’une personne en vous obligeant à réfléchir au placement et à la raison d’être des ellipses."
    Merci aux 42 participants ! Voici les trois gagnants qui remportent chacun un exemplaire du livre Bookmakers : Alice Zeniter coédité par les Éditions Points et ARTE Éditions.

    Les premiers livres de la collection Bookmakers : Alice Zeniter, Nicolas Mathieu et Maria Pourchet sont à retrouver en librairie. En janvier 2024, la collection s'agrandit avec un nouvel auteur : Hervé Le Tellier.

    Le podcast Bookmakers est quant à lui toujours disponible sur ARTE Radio et sur toutes les applis de podcasts.

    "Vie et mort de Guinefort Tapioca" de Monsieur Raoul
    Fuir la fatalité :
    Guinefort Tapioca est un bébé roux et joufflu, aux yeux anormalement séparés l’un de l’autre par un large front de boeuf. Il dort en soufflant bruyamment dans un mignon berceau bordé de mousseline, à l’aplomb sous le lustre de tante Léonie, au petit salon.

    Entrevoyant un futur sinistre, la faucheuse cherche à corriger l’erreur de la nature et scie à la hâte la chaîne de laiton qui retient le luminaire au plafond. Mais la bonne entre dans la pièce et le spectre drapé de noir s’oblige à disparaître, scie comprise ; les lois de l’au delà lui interdisant d’être visible des humains.

    Jeune homme en fleur :
    (…) Après çà, Guinefort Tapioca fait irruption dans la salle de classe pour essayer sa nouvelle moto cross très bruyante ; il fait des bonds sur les tables en faisant rugir l’accélérateur. Ce qui produit une fumée tantôt bleue tantôt gris clair qui prend à la gorge. Ce qui répand en spray de fines gouttelettes d’huile noire et poisseuse sur tout ce qui se trouve à proximité.
    Il effectue des sauts épouvantables très près de la tête de ses camarades de classe, ce qui les effraie et perturbe la concentration nécessaire aux exercices qu’ils essaient de faire malgré tout, en l’absence momentanée de leur professeur. Du mobilier est renversé. Des surfaces sont marquées des empreintes noires laissées par les pneumatiques de l’engin.

    Mais la moto tombe en panne. Il hurle si on peut l’aider à démonter sa roue qui est bloquée. J’arrive. Je n’aime pas son véhicule qui pétarade. Je ne souhaite pas qu’il puisse le redémarrer ; c’est trop bruyant. Comme je suis nul en mécanique, je fais n’importe quoi. Et la clef à molette se coince à mort entre les rayons et la chaîne. Je dis :
    « là, un aigle ! » Il regarde vers le haut et je pars en courant.

    Vitesse de croisière :
    Guinefort Tapioca est un affreux jojo. Comme il arpente son bureau, il fait venir un subordonné. Puis il commence par poser une question anodine, avec un calme apparent :
    « Qu’avez-vous pensé des résultats du football, ce week-end ? »
    Demande-t-il, tout en plissant les yeux, avec un mauvais air de fouine.

    Et là, peu importe la réponse du salarié. Cette convocation n’était qu’un prétexte pour houspiller sa victime :
    Sans crier gare, avec un fracas épouvantable, il projette brutalement sa chaise métallique contre le sol, ce qui ne manque pas de faire sursauter Roger ; ce pauvre collaborateur, et il lui crie : « vous n’avez pas honte?! »

    Puis, il contourne d’un bond agile le piteux employé de bureau et donne un tour de clé à la porte pour empêcher ce dernier de fuir. Précaution inutile car celui-ci semble paralysé sur place.

    « Savez-vous ce que la direction a comme opinion au sujet des gens comme vous ?! » dit-il en écrasant ostensiblement dans sa paume un paquet de cigarettes vide. Et il déverse ses vilaines paroles en fumant avec acharnement ; pour terminer tout le tabac dont il dispose.

    Le lendemain, 4 janvier à 6h30 du matin, Guinefort Tapioca, fulminant, hors de lui, repousse les employés des abords de la machine à café à l’aide du tuyau d’arrosage de la cour en ciment.
    « allez turbiner, je ne vous paye pas à traîner en pause ».
    Une fois les salariés mal installés sur les tronçons d’arbres abattus qui servent dechaises, çà moufte plus dans les rangs.

    Fruit blet :
    Guinefort arrive à pied au passage piéton régulé par des feux signalétiques ; comportant une silhouette marchante qui s’éclaire de lumière verte, et une autre, à l’arrêt, s’éclairant de lumière rouge. Le personnage à l’arrêt indique que les piétons ne doivent pas traverser et que c’est aux automobiles de passer.
    Tapioca fait l’inverse de ce que Christophe le sage flamboyant de l’empire céleste d’or et de diamant prescrit de faire dans cette situation :
    Donc il s’engage, satisfait par l’assurance qu’il à en lui même, et coupe la trajectoire de la chaussée, au mépris de tout signal lumineux.
    Car c’est d’abord lui et avant tout Guinefort ; le monde n’a qu’à se courber à son approche, après tout.
    Un camion fait une crêpe de Tapioca.
     



    "Fatima" de Isma Le Dantec
    Aujourd’hui, la terre a tourné une fois sans toi. C’était un matin, après seize autres paupières closes. Gaël a étouffé un gémissement au dernier battement de ton cœur. Articuler « c’est fini » puis imprimer ta photo en grand au centre commercial, celle où tu souris avec les lunettes de soleil et le collier orange. Au milieu du vacarme, nous ne savons déjà plus vivre. Tu nous a demandé d’être heureux, tu as dit « ça prendra du temps, plusieurs années peut-être ».

    Tu es née à Nanterre, le 20 mars 1967. Vous débarquez à deux d’un coup, rejoignant quatre aînés. Il parait que, malgré l’islam qu’on tente de t’inculquer, tu dégustes avec malice les morceaux de saucisson de tes voisins de cantine. Un noël, tu piques les chocolats de ta jumelle sous son oreiller. Tu t’installes toujours à table entre tes parents, la meilleure place pour une assiette garnie. Tu as une meilleure copine, Agnès Gilles, quarante ans plus tard tu l’appelles toujours Agnès Gilles comme à l’école. Tu n’as jamais vraiment quitté l’école, tu es douée et ta sœur aussi, on vous dit que vous pourriez être infirmières : vous êtes studieuses, mais arabes quand même. Vous devenez institutrices. Maintenant on dit professeur des écoles, tu as toujours trouvé ça pompeux, toi, c’était maîtresse Fatima. L’été, avec tes copains, vous explorez le continent africain, sac sur le dos et assez de galères qui finissent bien pour nous abreuver d’anecdotes à en écarquiller les yeux.

    Je ne sais pas ce que tu fuyais ou de quoi tu avais soif. Un jour, tu fais tourner ta mappemonde et pose le doigt pile à l’autre bout, au Vanuatu. Tu enfiles un short et pars enseigner sous les cocotiers. Là-bas, ta route croise celle d'un jeune reporter qui se la joue baroudeur ténébreux. Il te lance « attention, les journalistes terminent tous alcooliques, dépressifs et divorcés », tu lui répliques : « Qui t’a dit que je voulais qu’on finisse ensemble ? ». Deux ans plus tard, votre photo de mariage figure en Une du journal local. Tes parents, pas ravis, refusent de rencontrer Gaël, jusqu’au jour où vous sonnez avec un poupin rose dans les bras, je m’appelle Isma.

    Fini les tropiques, cap sur Bordeaux. Des journées d’enfants à instruire, tu veux qu’ils jouent beaucoup, tu leur lis plein d’histoires et leur apprends des danses farfelues. Tu prends au sérieux leurs peines de cœur et ris de leurs blagues, et c’est tout autant d’amour que tu donnes aux deux autres marmots qui t’attendent à la maison. Bilal a hérité de ta gourmandise, en atteste son premier mot : « gâteau ».

    C’est l’heure d’une nouvelle aventure, tu mets la maison dans un bateau et nous voilà sur l’île de la Réunion. Avec ta peau brune et tes cheveux qui défient la gravité, tu ressembles à s’y méprendre aux femmes créoles qui arpentent les allées du marché. Le soleil réchauffe ton cœur et nous grandissons bien. Dans la montagne, tu dis toujours en t’extasiant : « Regardez le paysage, buvez de l’eau ! » , on fait les deux en même temps et c’est vrai que c’est beau. On râle quand tu nous prends en photo mais ton bonheur est diablement communicatif, tu t’amuses d’un rien et nous avec, on rit à s’en tordre le bide. Tu te prends de passion pour les petits poissons du lagon, avachie sur ma serviette je te regarde traverser la plage en canard avec tes palmes et ton tuba, la hchouma. Quand on traîne la patte, tu ne manques pas de nous houspiller : « faut profiter ».

    Tu profites comme si tu savais que ce serait fini trop tôt. La maladie te tombe dessus un jour de septembre, le médecin retire presque tous tes intestins. On va toujours au lagon et marcher sur le volcan, ton corps tout maigre se bagarre avec voracité. On fête l’an nouveau dans la cuisine, on danse sur Rachid Taha en essayant de dérider Gael. Je me mords les joues pour pas pleurer, lui aussi je crois. Après ta retraite, tu voulais t’investir au planning familial, explorer encore l’Afrique avec les copains, nous montrer le Vanuatu. Tu es partie un matin, Gaël tenait ta main.
     



    "Django Petrograd" de "Mira Martin
    La manie de Pablo Avretski de noter chaque évènement de la vie, même mineur, dans un de ses petits carnets, avait ça de bon qu’il était, des années après, possible de reconstituer une biographie très précise de chacun de ses amis, à commencer par Django Petrograd lui-même. Il serait possible d’écrire à son sujet un bon millier de pages; mais on pourra également essayer de résumer sa vie en quelques quatre mille caractères, celle ci étant, étrangement, très systématiquement découpée en périodes de dix ans.

    Durant les dix, ou disons, vingts premières années de sa vie, Django Petrograd regretta de nepas être, comme son illustre homonyme, un génie de la guitare. Il avait eu beau s’entraîner encore etencore, les seuls sons qui sortaient de sa guitare étaient biscornus et disgracieux.

    A vingt ans, il découvrit quel était son vrai talent: la comptabilité. Il fallait bien faire quelque chose de sa vie; il se jeta corps et âmes dans cette voie, puisqu’une carrière dans la musique n’était décidément pas envisageable.

    Quand il eut achevé ses études – avec énormément de brio, il faut le dire, il partit en voyage, et il rencontra, dans un quelconque bazar turc, une jeune fille qui s’offrit de lui lire l’avenir dans le marcde café. Outre quelques banalités de rigueur, elle lui prédit, pour l’année de ses trente ans, un évènement qui changerait sa vie à jamais.

    En dix ans, Django devint le meilleur comptable du monde. Dans leurs domaines respectifs, on pouvait dire que Petrograd égalait bien un Stéphane Grapelli ou un Erik Satie. Mais il est moins facile de trouver la gloire derrière une pile de factures que sur une scène. Sûrement Petrograd aurait aimé vivre sous les vivats de la foule. Il se consolait en donnant fréquemment des conférences, très prisées des spécialistes - mais ce n’était pas la même chose.

    Exactement six mois après le jour de ses trente ans, une mouette fonça sur Petrograd, qui rentrait de vacances en ferry et lui arracha l’oeil droit. Il devint ainsi borgne, et se mit à porter un cache-œil. Était-ce ce cache-œil, ou ses longues moustaches fines qui attirèrent l’attention de Natasha Alexandrovna à cette fête de Noël 1972? Toujours est il qu’elle l’épousa deux ans plus tard.

    La vie de Django prit un autre tournant quand un soir, en rentrant chez lui, il entendit un bruit de l’autre côté de la fenêtre. Il venait d’avoir quarante ans. Il l’ouvrit et vit, flottant en l’air dans la nuit, John Coltrane qui jouait de la trompette. Quelques jours plus tard, c’était au tour de Getchatchew Mekurya d’apparaître avec son saxophone, lévitant au niveau de sa fenêtre. Sa femme,lorsqu’il lui raconta cela, crut qu’il était fou, jusqu’à ce qu’en rentrant un soir du travail elle constate elle même que Duke Ellington était là, trépignant dans la nuit, un immense piano à queue flottant avec lui en l’air . Les meilleurs jazzmen du siècle se succédèrent ainsi devant la fenêtre des Petrograd.

    Un jour, Django raconta à sa femme que Reinhardt en personne était apparu. -Et tu ne lui a pas demandé où était passée la partition de Requiem pour mes frères tziganes? Petrograd s’en mordit les doigts; il se jura de rattraper cette erreur.

    Il passa dix ans avant que Reinhardt ne réapparaisse. Django était alors prêt; il lui posa la question fatidique.

    -Je l’avais vendue à un colonel français, pour une bouchée de pain, en 1945, lui avoua t-il. Une mauvaise affaire; mais je n’avais pas ton talent pour la finance.

    Il ne fallut cependant pas longtemps à Petrograd pour retrouver la partition, restée depuis dans la famille dudit colonel.

    Il la confia à un chef d’orchestre de sa connaissance; et, quelques années plus tard, le morceau étaitjoué à l’opéra.

    Petrograd était assis au premier rang.

    La musique commença. Au bout de quelques instants, Petrograd sentit qu’il décollait du siège: il s’élevait, petit à petit dans les airs. Quand il regarda en dessous de lui, il vit qu’il était déjà à presque un mètre au dessus du sol. La musique remplit ses oreilles. Il continuait de monter; bientôt il était au niveau des balcons. Le plafond peint par Chagall, n’était plus qu’à quelques mètres. Son crâne perça délicatement la voûte. Il s’éleva encore de plusieurs mètres dans le ciel de Paris. La musique était toujours aussi forte, elle venait de partout à la fois, elle émanait du toit des maisons etdes nuages au dessus de sa tête. Une nuée d’oiseaux blancs volait dans sa direction. Quand ils furent plus près, Django vit que ce n’étaient pas des oiseaux, mais des factures.

    «Quel dossier finement mené!» s’exclama t-il en en attrapant une qui passait près de lui. Il monta encore plus haut; la musique envahit ses oreilles, envahit son crâne, jusqu’à ce qu’il se fonde dans les notes délicates du Requiem pour les frères Tziganes de Django Reinhardt, son plus illustre homonyme.

    Séance d'écoute : La fabrication du désir

    ARTE Radio s'installe à la Gaîté Lyrique pour des séances d’écoute mensuelles !

     

    Pionnière et référence du podcast, ARTE Radio propose désormais chaque mois, à la Gaîté Lyrique, des séances d’écoute de podcasts en avant-première. Une heure pour découvrir des courts-métrages audio intimes, ludiques et politiques, et échanger en direct avec leurs auteur·ices et la responsable de la radio web d’ARTE, Perrine Kervran.

     

    Cette séance sera consacrée à la série #WhenIwas15. Comment raconter la fabrication du désir ? Comment parler de son propre désir de manière sonore ? Les autrices du podcast seront présentes.
    Et on ne peut faire une séance d'écoute sur le désir sans diffuser un épisode des Chemins de désir. Claire Richard sera également présente pour répondre à vos questions.

     

    #WHENIWAS15, une série réalisée par Samuel Hirsch et Charlie Marcelet (12x4 min).
    Le 17 juillet 2023, le roman pour grands adolescents Bien trop petit de Manu Causse est interdit à la vente aux mineurs. En réaction à cette censure, l’écrivain Nicolas Mathieu lance alors le hashtag #WHENIWAS15 sur Instagram. Plus de 500 personnes vont répondre à l’appel et partager sur les réseaux des textes dans lesquels ils se souviennent de leurs premiers émois adolescents et leur découverte de la sexualité à travers la lecture. 70 de ces témoignages sont réunis dans un livre aux Éditions Thierry Magnier, mais aussi dans un livre audio édité chez Actes Sud. ARTE Radio adapte 12 de ces textes en podcast qui sont lus par leurs auteurs et autrices.

     

    LES CHEMINS DE DÉSIR, une série de Claire Richard, réalisé par Arnaud Forest (6x15 min).
    Dans cette autofiction, une femme explore les chemins du désir féminin, ses contre-allées déroutantes, ses ruelles cachées, ses zones de liberté. Comment l’imaginaire érotique se construit parfois loin de la vie amoureuse réelle. Dans une langue superbe, moderne et subtile, l’auteure retrace une vie de fantasmes et de plaisirs solitaires : de la découverte d’une BD de charme dans le grenier de sa grand-mère aux vidéos X d'aujourd’hui. À chaque épisode correspond une avancée technologique : le film de Canal+, l’Internet, le hentai...

         

    L'exercice d'écriture de Nicolas Mathieu

    Lancé sur Instagram, voici les textes gagnants du concours d'écriture proposé par Nicolas Mathieu dont la consigne était : "Concevez un personnage, sans le décrire, en 1000 mots." Parmi les 103 participations, voici les gagnants qui remportent un exemplaire du livre Bookmakers : Nicolas Mathieu coédité par les Éditions Point et ARTE Éditions.

    Les premiers livres de la collection Bookmakers : Alice Zeniter, Nicolas Mathieu et Maria Pourchet sont à retrouver en librairie. En janvier 2024, la collection s'agrandit avec un nouvel auteur : Hervé Le Tellier.

    Le podcast Bookmakers est quant à lui toujours disponible sur ARTE Radio et sur toutes les applis de podcasts.

    "La cheffe de caisse" de Juliette Bisard
    Elles sont alignées en rang d’oignons devant la pointeuse. On peut pointer dès 8h48, mais surtout pas après 9h02 sous peine de perdre un quart d’heure de salaire. Elle, elle n’arrive qu’à 8h59. Elle s’en fout, elle est au forfait-jour maintenant. 8h59, une minute avant que les portes battantes ne s’ouvrent, pour vérifier que tout le monde est à son poste. Puis elle déambule longuement dans l’artère principale, de la caisse centrale jusqu’à son bureau sans fenêtre, coincé tout au fond du magasin entre les packs d’eau et la cave à vins. Elle ne salue personne mais elle prend le temps de toutes les regarder, une par une, droit dans les yeux.

    C’est comme ça qu’on commande ici, c’est ce qu’elle a appris en vingt ans de métier. Pour se faire respecter, il faut pratiquer la terreur. Menacer de supprimer la prime de caisse de 18,35€. Surveiller les retards. Les faire rester cinq minutes de plus pour les faire chier alors qu’elles ont leurs gosses à récupérer. Punir les filles qui tchatchent entre elles ou qui se permettent de parler trop longtemps aux clients. On ne doit pas humaniser le métier, sinon les gens ne reviennent plus. Ils s’en foutent de parler à une caissière bousillée par les années à porter des packs de bières sur un tapis roulant. Non, les gens ce qu’ils veulent, c’est qu’on leur dise bonjour, merci, vous avez la carte du magasin, très bien monsieur allez-y, voilà votre ticket, merci, au revoir. A l’extérieur, trois ou quatre petits vieux attendent déjà depuis vingt minutes avec leurs caddies vides. Encore des cons qui vont ressortir cinq minutes après avec deux baguettes de pain industriel.

    Aujourd’hui, elle fait passer un entretien d’embauche. Une jeune fille du coin qui veut travailler l’été. D’habitude, on prend les enfants des salariés, mais comme plus personne ne veut bosser de nos jours, on est bien obligés d’ouvrir les candidatures à l’extérieur. Elle ne la connait pas, cette Camille.

    À 10h23, le téléphone sonne. Sa secrétaire lui dit que son rendez-vous est arrivé. Trente secondes plus tard, la fameuse Camille pose un pied dans son bureau. Elle paraît surprise de ne pas voir de fenêtre. C’est vrai que ça ressemble à un cagibi, mais elle croyait quoi, la petite, qu’on bossait à la Défense ? C’est Leclerc ici, pas la Société Générale.
    La fille dit bonjour, très polie. Elle a l’air beaucoup trop bien élevée pour travailler ici. Elle l’interroge sur son âge, ses motivations, trois qualités – curieuse, sérieuse et optimiste, a dit la fille -, trois défauts – perfectionniste, un peu stressée et elle n’en voyait pas de troisième. Ils sont vraiment tous pareils, la génération Z. Du copié-collé. Elle lui demande les études qu’elle fait, la fille répond « chimie des formulations ». Elle ne comprend rien à ce qu’elle lui raconte, la fille s’anime et parle d’adhésifs, de peintures et de cosmétiques, bref, ça fera bien l’affaire, on ne lui demande pas de commenter les étiquettes des produits qu’elle va biper après tout. Juliette Bisard – La cheffe de caisse
    Elle serre la main de la fille, ne lui promettant de la rappeler, mais elle attendra quand même trois jours parce qu’il ne faudrait quand même pas qu’elle croit que c’est facile de trouver du boulot.

    À 11h, elle reçoit une alerte : Alice a fait une erreur de caisse de 10€. Surement un billet collé à un autre. Alice vient d’arriver et c’est toujours la merde avec les nouvelles. Elle compose le numéro de son poste et lui passe une soufflante. Alice s’excuse, toute penaude, mais elle enfonce le clou : si tu refais une erreur pareille, on ne pourra pas renouveler ton CDD. Alice se tait. Elle a deux gamins et le père s’est barré. Elle ne peut pas se permettre de perdre le boulot.

    À 12h01, elle sort du micro-ondes son tupperware. Elle ne mange plus avec les autres à la cafet’. Ils n’ont plus le même statut maintenant. On ne mélange pas les torchons et les serviettes.

    À 12h12, elle s’allume une clope sur le seuil de la porte de service qui donne sur le parking brûlant et désert.

    À 13 h 34, elle se décide à compter les « suppo » que les filles ont fait remonter à la mi-journée. On est autour de 5000€ par caisse, c’est pas mal. Fois dix caisses, elle devrait avoir un bon intéressement à la fin de l’année. En même temps, sans elle, la boîte ne tournerait pas. C’est quand même bien normal qu’elle soit rémunérée à sa juste valeur, avec tout le mal qu’elle s’est donné pour parvenir jusqu’ici.

    À 15h37, elle commence un peu à s’ennuyer, la journée tire en longueur, alors elle décide de visionner les caméras postées sur les filles depuis les rayons. Sabine et Lucie sont en train de se parler. « Elles me font chier ces deux-là » se dit-elle alors elle compose le numéro du poste de Céline, à la caisse centrale, et lui ordonne d’envoyer Sabine à la caisse 19, celle du fond en face du mur, dos au magasin. Quant à Lucie, qu’elle l’envoie faire du facing, ça lui fera du bien de se geler les miches entre les paquets de jambon et les surgelés. Il faut faire croire aux filles de la centrale qu’elles sont importantes pour se les mettre dans la poche mais la vraie boss, c’est elle. Diviser pour mieux régner.

    À 16h56 elle éteint son ordinateur et claque la porte du bureau. Elle sort par la porte de service. Pas de déambulation dans l’artère centrale en fin de journée, il ne faut pas que les filles voient à quelle heure elle s’en va. Elle met le contact et au moment de démarrer, elle se dit que demain matin, à l’embauche, ce serait quand même bien d’envoyer Alice à la boulangerie faire cuire les croissants, histoire de. 45 degrès quand il en fait 37 dehors le matin, ça devrait la calmer un peu.
     



    "Kylie" de Anna Souillac
    Je vais t'expliquer comment ça va se passer parce que t'as l'air de croire qu'y a une alternative possible à ton histoire. Tu vas l'approcher entre deux cours, à la récré, au self ou à la sortie. Peu importe. Elle sera jamais seule. Tu devras percer une ligne de front et ce sera déjà foutu. Même si t'avances d'un pas décidé et que tu te plantes à côté d'elle, y aura toujours sa horde de copines autour d'elle. Ou pire, Hugo et sa bande. Là, t'as déjà perdu 70% de la confiance que t'avais en arrivant. Admettons que tu trouves le courage de lui sortir ton laïus. Tu vas lui dire quoi exactement ? « Hé Nina, ça te dirait qu'on aille au ciné toi et moi samedi aprèm. Y a une retrospective Henri-Georges Clouzot à l'Arlequin » ? Et ils rigoleront tous avant qu'elle ait eu le temps d'ouvrir la bouche. Une parfaite issue de secours pour elle, elle aura même pas besoin de te mettre un vent. Elle aura qu'à réajuster son sac à 800 boules sur son épaule et tourner les talons. Et tout le monde t'appellera Henri-Georges jusqu'au bac, voilà ce que t'auras gagner. Et là, je te fais la version la moins humiliante. Elle pourrait très bien se contenter de rouler une pelle à Jonas devant toi. Elle l'a déjà pécho à la teuf de Basile y a deux semaines, c'est Clara qui me l'a dit. Tu sais, ces teufs où on est jamais invités. Fais pas cette tête, putain. Je te dis ça pour t'éviter te taper l'affiche.

    Enfin, non, je dis ça parce que j'ai beau me creuser la tête, je comprends pas. Pourquoi c'est toujours pareil hein ? Pourquoi un mec comme toi fait une fixette sur une meuf comme ça. Qu'est-ce qu'elle a pour elle franchement ? C'est un vraie question putain, qu'est-ce qu'elle a ? C'est une élève moyenne, on peut pas dire qu'elle soit franchement rapide. Elle est pas particulièrement drôle, les trois fois où t'as sorti une vanne devant elle, elle nous a regardés avec ses yeux de merlan frit. Elle est pas gentille non plus, demande à Clara. Elle s'est foutu de sa gueule l'autre fois dans les vestiaires avant le volley parce qu'elle portait pas de soutif. Non, le seul truc qu'elle a, c'est qu'elle est belle. Ça oui putain elle est belle. Et toi ça te suffit, et c'est ça qu'est dégueulasse au fond. Parce que dans ton conte de fées, elle va s'apercevoir que t'es un mec brillant, gentil et drôle et elle va tomber amoureuse de toi. Et tu vois même pas l'ironie du truc, l'hypocrisie totale de la chose. Elle doit t'aimer pour ce que tu es au fond alors que toi tu la kiffes parce qu'elle est bonne. En quoi c'est réglo ? Pour elle évidemment mais surtout pour toutes les autres ? Pour celles qui sont brillantes, gentilles et drôles. Elles, elles peuvent aller se faire cuire le cul, c'est ça ?

    En vrai elle pourrait très bien tomber amoureuse de toi. Malgré tout ce que j'ai dit depuis le début, elle pourrait, évidemment, personne peut-être aussi con pour ne pas voir que t'en vaux la peine. Mais nous, les autres, on fait quoi ? Moi, moi je fais quoi ? Moi, je les comprends tes blagues et tu ris aux miennes, je sais que t'éternues quand tu stresses et que t'as peur des serpents, surtout des crotales. J'ai vu Le Salaire de la Peur et j'ai lu Moon Palace. Je sais équilibrer une équation chimique et ce qu'est un chiasme. J'étais là quand ton père est tombé malade et quand tu t'es fait jeté par Manon. Et tout ça pour quoi ? Pour rien. Tu me vois même pas. Parce que ce qui compte c'est pas ce que je suis, c'est tout ce que j'ai pas : des cheveux soyeux et disciplinés, la taille d'une môme de huit ans, un nez fin, des traits symétriques, une bouche pulpeuse. Non, moi je fais partie de celles chez qui ça pousse dans le désordre, n'importe comment. Un sein d'abord puis l'autre, le cul qui n'en fait qu'à sa tête. Celles que la puberté fait grandir dans tous les sens sauf en hauteur. Et pour ça je suis condamnée. Le jeu est perdu d'avance parce qu'il est faussé. J'avais pourtant bien lu les règles mais que dalle. Contente-toi d'être toi-même, sers toi de ta tête, ne fais pas aux autres ce que tu ne voudrais pas qu'on te fasse. Un ramassis de conneries, ouais. Les belles n'ont jamais à lever le petit doigt et les meufs intelligentes rament dans un lac asséché. Et après on s'étonne que Kylie Jenner existe. Pourtant c'est limpide. Kylie Jenner, c'est la revanche d'une gamine intelligente qu'a passé son enfance à écouter des gens lui parler de son physique, de son physique moins avantageux que celui de ces sœurs. Alors à seize ans, parce qu'elle avait compris depuis longtemps que l'organe le plus important d'une meuf, ce serait jamais son cerveau, elle a dit fuck it et elle s'est fait ravalé de fond en comble. Et aujourd'hui, elle est milliardaire et elle se tape Timothée Chalamet. Et tout le monde la méprise, mais tous les mecs aimeraient coucher avec elle et toutes les meufs aimeraient lui ressembler, rien qu'une semaine, rien qu'un jour. Alors moi je dis bravo Kylie. Je pensais pas, mais au fond t'as tout compris. Et quelque part en Californie, je suis sûre qu'y a un mec qui mate des photos d'elle à cette seconde même, un mec brillant, gentil et drôle. Un mec qui se mord les doigts de l'avoir ignorée quand ils avaient quinze ans.
     



    "Pétrole" de Marianne Skorpis-Rimo
    Il ne se rappelle plus quel jour il a commencé à boire du pétrole. Depuis il boit, il boit.

    Il y a le soleil, la mer et les autres. La mer ne fait plus de bruit. Le glouglou du pétrole, le son des machines absorbent tout.

    La mer ne bouge pas. Surface lisse, plane, mer d’huile comme on dit. Mer d’huile ou falaise, vertige sans fond.

    Il faut vider, vider les cuves du bateau. Un autre est là, en face, neuf, prêt à accueillir le pétrole.

    Le bateau actuel est grand, large, rouillé. La corrosion monte, mange ses parois.

    On dit qu’il pourrait exploser, se disloquer, provoquer une marée noire. Les poissons, les oiseaux recouverts de pétrole, embourbés dans la masse visqueuse.

    Alors on le vide. On transvase, on transfère. Bientôt, le bateau ne servira plus à rien.

    Ils disent qu’une fois vidé, le bateau sera remorqué pour être détruit. Il sait que ce n’est pas vrai. Le bateau sera abandonné, lui aussi. Il s’enfoncera dans l’eau, englouti dans les profondeurs. On abandonne toujours ceux qui ne servent plus à rien.

    Petit, il avait senti pour la première fois l’odeur du pétrole dans un garage. Une odeur âcre, désagréable. L’odeur lui était restée accrochée aux narines.

    Maintenant, il passe ses journées avec le pétrole. Le pétrole est partout, dans les tuyaux, dans les cuves, dans son esprit, maintenant dans son ventre.

    La première fois, c’est arrivé sans penser, sans faire attention. Un tuyau avait fui, il a enlevé son gant et passé la main. Cette chose noire sur sa peau blanche. L’odeur, malgré son masque. Et la chaleur. Il a enlevé son gant, passé la main et il l’a léchée. Trois gouttes seulement, cela a suffi.

    Quelques jours plus tard, il a attendu que les autres soient partis et s’est servi dans une cuve. Quelques gouttes seulement ce n’est rien, rien du tout.

    Il fait si chaud. Toute la journée sous le soleil, 45 degrés, la lourde combinaison, le casque, les bottes, les cuves qui n’en finissent pas de se vider.

    Parfois, il a l’impression de se perdre. Alors il boit, il boit.

    La première fois, cela l’a brûlé de l’intérieur. Maintenant, il attend chaque soir le moment où les autres s’arrêtent de travailler et il boit, il boit.

    La nuit, ses rêves n’ont plus de forme, ils s’entremêlent comme de la mélasse. Le matin, quelques éclats ressortent, quelques images. Des fosses remplies de boue, des matières indistinctes dans les entrailles de la terre.

    Il faudrait qu’il pleuve un jour.

    Tous ces tuyaux, une forêt de tuyaux couleur rouille, avec leurs lourds volants. Tous ces hommes, en combinaison orange, qui ne disent pas un mot. Ils travaillent, travaillent. S’il n’y avait pas de nuit, ils ne s’arrêteraient pas de travailler.

    Les gestes, toujours les mêmes. Pomper, vider. Comme si, une fois les cuves à sec, un grand mystère serait révélé.

    Les cuves se vident et il se remplit.

    Le soleil l’aveugle. Pas d’ombre sur le bateau. Il voit, mais il ne voit plus.

    Jusqu’ici, il avait toujours fait confiance à ses yeux. Ses yeux le guidaient.

    Maintenant, c’est l’odeur. Celle du pétrole, de sa transpiration, de celle des autres. Et la soif. Depuis qu’il a goûté le pétrole il a soif, sans cesse soif.

    Il pourrait faire ces gestes les yeux fermés. Pomper, vider, boire. Jusqu’à la fin des temps.

    Il ne sait plus depuis combien de jours, combien de semaines il est sur ce bateau. À chaque jour succède une nuit, puis un jour, encore un autre. Toujours le même.

    La première fois, le pétrole l’a brûlé de l’intérieur. Un feu plus doux et plus long que celui du soleil. Les poisons les plus lents sont les plus dangereux.

    Le feu peut s’éteindre. Pour l’entretenir, il faut continuer à boire.

    Combustion, pas celle d’une allumette qui flambe brusquement jusqu’à extinction non, combustion permanente.

    Le feu lui fait mal, il ne peut plus se passer du feu.

    Depuis qu’il boit, il tient mieux l’effort. Le midi, il ne fait plus de pause, mange à peine. Il n'est pas très fort pourtant, plus petit que les autres même. Ses muscles sont minces, secs. Quelque chose s'est éveillé en eux.

    Les collègues savent qu'il a changé. Ils le voient, le regardent.

    Lui ne les regarde plus. Il se lève, il boit. Il vide, il remplit. Il boit, il se couche.

    Il doit continuer à le cacher aux autres. Pas par honte, non, mais parce qu’on pourrait l’empêcher de boire.

    Le monde a disparu. Il n'y a plus que le bateau et la mer.

    Son corps aussi pourrait disparaître. Il a maigri, ses os saillent.

    Quand il lève la tête, le ciel est toujours le même. Le ciel ne bouge pas, le ciel a arrêté de bouger. Il n'est plus bleu, il est blanc. Le ciel est devenu rigide, c'est un enclos et il ne peut lui échapper. Tout comme il ne peut échapper aux jours, aux jours qui refusent de s'arrêter.

    Un soir, il vomit. Les jours suivants, il crache du sang. Le sang ne ressemble pas à du sang. Il est rouge foncé, presque noir.

    La nuit, une fièvre le saisit. Il sue à grosses gouttes, se réveille trempé. On dirait que son corps se vide de l'inutile : l'eau, le sang, le gras.

    Un jour, le chef de son équipe dit : nous en sommes aux deux tiers. C'est un chiffre et cela ne veut rien dire.

    En rêve, il se voit en train de couler, lentement. Ce n'est pas le bateau qui coule, c'est bien lui. La mer est noire, noire et visqueuse.

    Un jour, il tente de ne pas boire. Au travail, il est empâté, brumeux. Ses membres sont lourds. Il part se coucher en évitant de passer devant la salle, celle-là. En pleine nuit, la soif se réveille. Dans un demi-sommeil, ses jambes le guident jusqu'à la salle, celle-là. Et il recommence à boire.

    C'est un matin, c'est un après-midi. Il avait oublié le blanc du soleil, s'y était habitué, et le blanc le frappe. Ses yeux ne voient plus, il est étendu par terre. Personne ne viendra le relever. Tous gisent pareillement, des gouttes noires perlant à leurs lèvres.

    Concours de l'été 2023

    Du 1er juillet au 31 août 2023, les Audioblogs d'ARTE Radio organisent, en partenariat avec Télérama et Sennheiser, leur 9e concours dédié à tous les amoureux du podcast, professionnels ou amateurs.

    UN ÉTÉ TOUT NEUF
    Raconter l’état du monde ou de votre quartier, vos rêveries solitaires sous la voûte étoilée, vos histoires de luttes ou d’amitié, le rire d’un filleul en train de muer ou les souvenirs d’une aïeule qui aime bien causer... C’est l'été : on prend le temps, on tend le micro à la vie comme elle va, comme elle résonne quand on pose sur elle une oreille singulière. Vrai reportage ou fiction audio, podcast intime ou docu politique : libre à vous de choisir le thème et la forme sonore qui vous conviennent. Seule contrainte, votre podcast audio devra faire 3 minutes maximum.
    Pour participer, chaque internaute devra envoyer par courrier électronique à l’adresse audioblog@artefrance.fr son podcast en format mp3, avec un titre, un court texte de présentation, une photographie et ses coordonnées. Le mot « Concours podcast été 2023 » devra figurer en objet du courriel. Les participants doivent s'assurer de détenir tous les droits nécessaires (dont la musique) sur leur programme sonore.

    Les podcasts reçus seront publiés au fur et à mesure sur cet Audioblog dédié : https://audioblog.arteradio.com/blog/203804/concours-arte-radio-2023

    Les prix :
    • 1er prix : une diffusion rémunérée sur ARTE Radio + une diffusion sur le site de Télérama + un abonnement papier d'un an à Télérama + un kit USB Microphone Streaming Set (avec bras articulé) + un casque audio Sennheiser HD 300 Pro
    • 2ème et 3ème prix : un casque audio Sennheiser + un abonnement digital d'un an à Télérama

    Tout savoir sur le règlement.

    Le jury : Carole Lefrançois (journaliste à Télérama), Delphine Saltel (autrice pour ARTE Radio et France Culture), Thomas Guillaud-Bataille (coordinateur des Audioblogs)

    Date limite d'envoi : jeudi 31 août 2023 (inclus).

    Suivez le concours tout l'été sur notre page Facebook.

    AVIS AUX DÉBUTANTS : Si ce sont vos premiers pas dans le podcast, n'hésitez pas à consulter nos articles dans la rubrique Entretiens et conseils pratiques des Audioblogs : vous y trouverez de précieux conseils pour débuter en prise de son ou en montage.
    - Prise de son : les 15 erreurs du débutant
    - Montage audio : 15 conseils aux débutants
    - Mixage radio : 10 conseils aux débutants
    - Réalisation de podcast : nos astuces

    Bonne écoute du monde,
    Bel été,

    Les Audioblogs d’ARTE Radio
    Avec Télérama et Sennheiser

    100e Séance d'écoute ARTE Radio

    Le rendez-vous du « cinéma pour les oreilles » dimanche 4 juin 2023 à 18h à la Maison de la Poésie.
    Des courts-métrages audio ludiques, politiques ou intimes, présentés par leurs auteurs.

    Au programme de ce dimanche 4 juin :
    À CŒUR OUVERT, un documentaire de Léa Chatauret, réalisé par Samuel Hirsch (50 min).
    "Il y a 3 ans, mon père Jean attend la greffe d’un nouveau cœur. Au même moment, j’entends pour la première fois battre dans mon ventre le cœur de ma fille Aglaé. En parallèle, le cœur de ma grand-mère paternelle, Geneviève, s'essouffle. C’est donc un moment où sur 4 générations, il se passe quelque chose d’intense dans nos corps et nos cœurs.
    Le jour même de la mort de ma grand-mère, mon père est greffé. Après la transplantation, je lui demande comment il se sent et il me répond : “Tu sais… j’ai l’habitude de me dissocier : d’un côté ma tête, et de l’autre mon corps”. Et là, je sais de quoi il veut me parler. »

    « L’un des meilleurs documentaires produits ces 20 dernières années » (ARTE Radio)

    Une séance animée par Silvain Gire. En présence de l'autrice Léa Chatauret.
    Tarif : 6 € / adhérent : 0 €

    Plus d'infos
    Réservez en ligne

    "La Reine des Pirates" rejoint le catalogue de l’enceinte Merlin

    Avec plus de 200 contenus audios issus des catalogues jeunesse de Radio France et Bayard, l’enceinte Merlin propose aux enfants de 3-12 ans une expérience ludo-éducative sans précédent. ARTE Radio offre sur son site des documentaires et des fictions qui font référence. Présente sur l'appli de Radio France depuis 2020, elle intègre pour la première fois l’expérience Merlin avec la série audio de Claire Richard La Reine des pirates. La série sera disponible sans supplément dans le catalogue audio de Merlin du 31 mars au 13 juillet 2023.

    À cette occasion, nous vous proposons de remporter une enceinte pour fêter cette arrivée. Pour participer :
    > Vos enfants doivent se dessiner en pirate afin de rejoindre l’équipage d’Anne Bonny
    > Envoyez-nous leur dessin par mail à l’adresse : contact-arteradio@artefrance.fr
    Fin du concours le 8 mai, l’équipage choisira le meilleur dessin.

    Merlin est une sélection audio pour enfants, à écouter sur une enceinte dédiée. Elle propose de nombreux contenus audio (fictions, documentaires, contes, séances de yoga, etc) et jouit d’un savoir-faire unique. Merlin est disponible à la vente sur le site hello-merlin.com et dans de nombreux réseaux (FNAC, Nature & Découvertes, Oxybul, Bayard-jeunesse.com et Milan-jeunesse.com…). Plus de 80 000 enceintes ont déjà été vendues depuis son lancement.

    La reine des pirates
    Anne Bonny est une pirate, une vraie. Au 18e siècle, elle a vécu déguisée en homme sur le bateau du capitaine Jack Rackham. Pour apprendre aux enfants comment on devient pirate, elle leur raconte son histoire dans une fiction sonore à grand spectacle. Comment elle est née bâtarde dans un village d'Irlande, comment elle a traversé l'Atlantique à 12 ans avec son père et sa mère pour rejoindre le Nouveau Monde, et comment elle y a rencontré Jack Rackham et Mary Read, qui deviendront respectivement son amoureux et son amie. Un palpitant voyage dans l'âge d'or de la piraterie, bercé par des réinterprétations de chants traditionnels pirates, pensé pour le jeune public (7-12 ans).
    « Pour être pirate, il faut pouvoir rester en mer pendant des mois sans pleurnicher parce qu’on voudrait aller jouer au parc. Manger des biscuits pleins de sable sans chouiner qu’on préférerait des frites ! »

    ARTE Radio part en live

    Le Palais de Tokyo invite ARTE Radio à s’exposer dans ses murs du 3 au 12 décembre 2022. Pionnière et référence du podcast, la radio d’ARTE déménage sur place pour y créer un podcast chaque jour et dévoiler en direct sa fabrique du sonore. Programmation complète sur le site du Palais de Tokyo.

    2002-2022 : 20 ans de créations sonores
    En employant des jeunes talents (on aime à dire ici que « les débutants sont une valeur sûre »), ARTE Radio a fait émerger des voix nouvelles. Des autrices et auteurs qui donnent à entendre ce qui change, murmure, crie et chante dans les marges de la société comme au cœur de l’intime.
    Aujourd’hui ARTE Radio, c’est +2000 podcasts en ligne, 60 prix internationaux, près de 2 millions d’écoutes par mois. Pour ses vingt ans, le Palais de Tokyo invite ARTE Radio à faire écouter son best of de femmes puissantes et de mauvais garçons, d’ambiances tropicales et de fictions sonores. Surtout, la petite équipe d’autrices, productrices et réalisateurs déménage son studio au Palais de Tokyo pour produire chaque jour ses podcasts sur place et en direct. Le public pourra donc assister aux enregistrements, montages et mixages, participer aux réunions, rencontrer les auteurEs et échanger sans oreillette.

    Au programme, du 3 au 12 décembre
      Dépêche !, un podcast fabriqué chaque jour en direct :
    « Olivier Minot ne résiste à aucun détournement créatif et rafraîchit le genre » (Le Monde). Chaque jour Livo aka Olivier Minot mixe avec brio l’actualité (inter)nationale et les échos de la performance au Palais de Tokyo.

      Chaque soir à 19h30, rencontre et débats avec les auteurEs autour de leur pratique du podcast : on parle des enjeux du documentaire ; de la place de l'autofiction ; du rapport à la musique ; des vertiges de l'intime... Programme complet sur le site du Palais de Tokyo.

      Des émissions réalisées sur place :
    Un podcast à soi par Charlotte Bienaimé - Samedi 3, dimanche 4, lundi 5
    Bookmakers par Richard Gaitet - Dimanche 4, jeudi 8, dimanche 11
    Vivons heureux avant la fin du monde par Delphine Saltel - Lundi 5, mercredi 7, jeudi 8
    Enregistrement des invités, des musiques originales et des textes, montage, mixage et mise en ligne, échanges avec le public.

      Rencontre et dédicaces de "Un livre à soi" par Charlotte Bienaimé - Samedi 3.
    Charlotte Bienaimé prolonge la réflexion d'Un podcast à soi et raconte comment ce travail a bouleversé sa vie dans un livre paru le 26 octobre (Stock/ARTE Editions).

      Présentation de podcasts inédits :
    La Dernière Nuit d’Anne Bonny, une fiction de Claire Richard (9x20 min) réalisée par Sabine Zovighian et Arnaud Forest – Samedi 10 décembre.
    La vie d‘une femme pirate au 18e siècle racontée par Claire Richard (Les chemins de désir) en une superproduction sonore.
    Démonstrations de réalisation et de bruitage.
    Anne Bonny, reine des pirates, une fiction de Claire Richard (6x15 min) réalisée par Sabine Zovighian et Charlie Marcelet.
    L’histoire de la célèbre femme pirate Anne Bonny racontée à la jeunesse.
    À l’atelier des enfants les mercredis et week-ends.

      Rencontres avec l’équipe et les auteurEs
    Tous les jours, l’équipe d’ARTE Radio travaille en direct et en public : réunions, entretiens, production… Des moments de démonstration (montage, mix…), d’écoute et d’échange sont aussi assurés régulièrement.

      6 bornes d’écoute intime + 2 salles d’écoute collective
    Une sélection d’œuvres à écouter seul.e ou en groupe. Au casque dans la grande salle ou en écoute « ouverte » dans les splendides salles de cinéma.

    Suivez l'événement sur Facebook et retrouvez toute la programmation sur le site du Palais de Tokyo.

    CONCOURS - Un été en liberté

    Du 1er juillet au 31 août 2022, les Audioblogs d'ARTE Radio organisent, pour la huitième année consécutive, en partenariat avec Télérama et Sennheiser, leur concours dédié à tous les amoureux du podcast, professionnels ou amateurs.

    Un été en liberté ! 
    Cette année, petite nouveauté : le thème est libre. Qu'il soit crissant comme un pneu sur la neige, glissant comme un pavé sous la pluie de novembre, ou gazouillant comme le merle amoureux au printemps, votre podcast nous intéresse. S'il est hâlé comme une peau d'aoûtien•ne, ça marche aussi bien sûr. De toute façon, y'a plus de saisons, on fait du son par tous les temps, on tend l'oreille et les micros aux bruits du monde et de l'époque. Vrai reportage ou fiction audio, podcast intime ou docu politique : libre à vous de choisir la forme sonore qui vous convient. Il reste tout de même une contrainte sinon ce n'est pas drôle : votre histoire audio devra faire 3 minutes maximum. A vos micros et vive le podcast.
    Pour participer, chaque internaute devra envoyer par courrier électronique à l’adresse audioblog@artefrance.fr, son podcast en format mp3, avec un titre, un court texte de présentation, une photographie et ses coordonnées. Le mot « Concours podcast été 2022 » devra figurer en objet de leur courrier. Pour toute utilisation musicale, les participants doivent s'assurer détenir tous les droits nécessaires sur leur programme sonore.


    Les podcasts reçus seront publiés au fur et à mesure sur cet audioblog dédié : https://audioblog.arteradio.com/blog/188050/concours-arte-radio-2022

    Les prix :
    • 1er prix : une diffusion rémunérée sur ARTE Radio + une diffusion sur le site de Télérama + un abonnement papier d'un an à Télérama + un micro de reportage Sennheiser + un casque audio Sennheiser
    • 2ème et 3ème prix : un casque audio Sennheiser + un abonnement digital d'un an à Télérama

    Tout savoir sur le règlement : ici

    Le jury : Carole Lefrançois (journaliste à Télérama) , Adila Bennedjaï-Zou (autrice et productrice radio pour Les Pieds sur Terre et LSD sur France Culture), Silvain Gire (rédacteur en chef d’ARTE Radio), Thomas Guillaud-Bataille (coordinateur des Audioblogs)

    Date limite d'envoi : mercredi 31 août 2022 (inclus).

    Suivez le concours tout l'été sur Facebook.

    AVIS AUX DÉBUTANTS : Si ce sont vos premiers pas dans le podcast, n'hésitez pas à consulter nos articles dans la Rubrique Ingénieux du son : vous y trouverez de précieux conseils pour débuter en prise de son ou en montage.
    - Prise de son : les 15 erreurs du débutant
    - Montage audio : 15 conseils aux débutants
    - Mixage radio : 10 conseils aux débutants

    Bonne écoute du monde,
    Bel été,

    Les Audioblogs d’ARTE Radio
    Avec Télérama et Sennheiser
     

    ARTE Radio a aussi son application mobile

    Rester sur le site
    Description artwork
    Temps écoulé : 1 minute 20 secondes
    Durée : 3 minutes 6 secondes
    Description image
    Temps écoulé : 1 minute 20 secondes
    Durée : 3 minutes 6 secondes
    À l’écoute

    Fantazio & Co Épisode 2

    Sex & sounds

    Et si on pouvait enlever les sons du sexe - les gémissements, les orgasmes, les lits qui grincent, les vantardises, les frouts ?

    Lire la suiteLire la suite

    Ma liste de lecture

    Le son a bien été ajouté à la liste de lecture

    Fermer la popin